Par Romain Baheux
Le 5 novembre 2018 à 06h17, modifié le 5 novembre 2018 à 06h46
« Et pour le sport, je dois mettre quoi maman? » « Non, là tu portes ce que tu veux. » Lorette ne se posera plus beaucoup de questions sur ce qu'elle doit enfiler pour aller en classe. Lundi, l'élève de CM2 et ses camarades des écoles élémentaires de Provins (Seine-et-Marne) inaugureront leur uniforme. Si la tenue unique est un classique pour les écoliers des Antilles ou de Guyane, il s'agit d'une première en métropole pour des primaires dans le public.
« On parle de nous, et c'est positif, estime l'homme à l'origine du projet, le maire Olivier Lavenka (LR). C'est l'occasion de lancer un beau débat autour des valeurs de l'école de la République. »
A Provins, il a été tranché avec 62 % des familles favorables lors d'une consultation organisée en juin. « Certains ont boycotté le vote, explique Stéphanie Bainville, déléguée de parents d'élèves. On peut être d'accord ou non, mais il fallait s'exprimer quand on en avait l'occasion. »
Néanmoins, les réfractaires pourront continuer à revêtir les jeans et pulls de leur choix. Puisque l'Education nationale ne bannit que les tenues « pas convenables », seuls les volontaires parmi les 700 écoliers de la ville arboreront l'uniforme flanqué de la devise de la République lundi. « On veut mettre en avant ce qui nous rassemble et donner une belle image de la communauté éducative. A l'heure où l'on parle du rôle de sanctuaire de l'école, on donne du concret », souligne Olivier Lavenka.
« Comme dans les films américains »
Pour aider les parents à payer les 137 € du trousseau de dix vêtements, la mairie propose d'étaler les paiements jusqu'à dix fois et fait une réduction de 50 % pour le deuxième enfant. L'incitation ne s'est pas arrêtée là selon certains opposants.
« On nous a dit que l'on remettrait en cause des dérogations à la carte scolaire si on ne suivait pas le mouvement », explique Cyril*, un père de famille. Des accusations niées par l'édile. « Je tiens à la liberté de choix, répond-il. On verra si l'uniforme se diffuse et on fera le bilan dans quelques années. »
« Je le trouve beau et je me sens à l'aise dedans même si j'aurais bien aimé un peu plus de rouge, explique Lorette. Ça fait un peu comme dans les films américains. Toutes mes copines n'en ont pas, mais certaines m'ont dit qu'elles voulaient que leurs parents l'achètent. » Pour l'instant, 350 commandes ont été passées, soit la moitié des effectifs des six écoles de la commune.
« Si c'est pour deviner l'opinion politique des parents… »
« Il y aura des disparités d'un établissement à l'autre et on espère que les enfants ne seront pas pointés du doigt pour leur choix, estime Julien Fernandez, cosecrétaire départemental du syndicat d'enseignants SNUipp-FSU, classé à gauche. Si c'est pour qu'on devine l'opinion politique des parents aux vêtements des enfants, je ne vois pas l'intérêt. »
Du côté du ministère de l'Education nationale, Jean-Michel Blanquer s'est prononcé en faveur de l'uniforme pour les écoles qui le souhaitent. Dans le Rhône, la ville de Meyzieu suit de très près l'expérience provinoise. « Et d'autres communes ont appelé pour se renseigner », assure Olivier Lavenka. De là à lancer la mode au niveau national ?